Informer pour changer vraiment
Introduction :
Les promesses sont oubliées. La violence structurelle
institutionnalisée continue de faire des dégâts incalculables sur
nos vies et notre environnement. Les bombes françaises n’épargnent
pas les enfants soldats. La
régulation des marchés financiers
ne se fera pas. Les seigneurs de la finance continuent d’étendre
leur main noire sur un monde nécrosé de toute part. Les États et
les entrepreneurs aux abois cherchent à contourner les règles de
l’OMC et les travailleurs sont la cible du patronat. La faim tue
toujours. Les
dictateurs chinois préparent la relève de l’empire américain.
Seule la société civile sauve l'honneur, les AMAPs et le SCOPs
résistent à la récession.
Des
centaines d'enfants soldats,
filles et garçons, sont présents dans les groupes islamistes
combattants du Nord malien. La représentante de l'Unicef F.
Ackermans l’a confirmé en février à l'AFP, ainsi qu’Anne
Lamotte de France Info. Les bombes françaises ne sélectionnent pas
les ennemis et le silence des médias demeure sur les éventuelles
victimes enfantines. Ainsi, la France
défie les Conventions de Genève (1949) et la Convention des droits
des enfants (1989). Les
États continuent à ne jurer que par la défense armée, alors que
des stratégies non militaires sont réalisables à moindre coût,
avec une formation adéquate de la société civile à la résistance
non armée (voir Le
guide de la révolution non-violente).
En un mois, la France (nous les contribuables) a dépensé plus de 70
millions d’euros au Mali et chaque jour supplémentaire lui coûte
2,7 millions. Que font l’Organisation des Nations unies (ONU) et
les autres États européens depuis deux mois ? L’ONU attend
un feu vert de son Conseil de sécurité et la sécurisation du
territoire malien pour déployer des casques bleus. Nos partenaires
européens se font très discrets. Le futur Conseil européen
consacré au renforcement de la défense européenne ne se tiendra
qu’en décembre 2013. En 2011 l'Europe a consacré à la défense
environ 180 milliards d'euros, soit 1,6% de son Produit intérieur
brut (PIB).
La
théorie de l'autorégulation
des marchés financiers empruntée à l'économiste
libéral Adam Smith (1723-1790)
par les économistes monétaristes de l'école de Chicago comme
Milton Friedman (1912-2006), est à peine écornée en 2013, après
cinq ans de récession économique déclenchée par le casse
financier des « subprimes ». Il semble cependant que la
« main invisible » providentielle de Smith soit toujours
en congé maladie, et pour longtemps encore. Nos représentants
politiques n'ont pas pour autant régulé la finance internationale,
bien au contraire, et 2013 ne sera pas plus l'année du
« changement » que 2012. Depuis
la « crise », les marchés financiers ont même renforcé
leur autorité sur les États, les entreprises et les banques. La
spéculation financière à grande vitesse continue de fausser les
prix du marché et d’exposer les économies réelles à la
récession. Le capitalisme ultralibéral reste roi, et la spéculation
financière demeure le principal outil de rentabilité. Les traders
œuvraient même pour la désintégration de l'Union européenne et
la fin de l'euro, afin de faire de juteuses plus-values, d'où
l'engagement de la Banque centrale européenne (BCE) de racheter de
la dette des États les plus en difficulté pour éviter l'implosion
de la « zone euro ».
Les
promesses de régulation des marchés financiers
faites par les politiques ont accouché d'une souris. La
réglementation bancaire mondiale, dite Bâle III, consiste à
vouloir recapitaliser les banques pour 2019, afin de leurs permettre
de mieux résister aux futures secousses financières. Non, on n'en a
pas fini avec les crises... Les États-Unis et le Royaume-Uni ont
séparé les activités des banques de dépôt et des banques
d'affaires, la France suit le même chemin. La BCE se propose de
surveiller les 200 plus grandes banques de la « zone euro ».
Toutes ses mesurettes ne portent pas atteinte à la « finance
de l'ombre » estimée à 67000 milliards de dollars, le système
responsable des fameuses « subprimes », créées par la
banque d'affaires Goldman Sachs. L'Organisation
internationale des commissions de valeurs demande la création d'une
base de données pour mieux comprendre les agissements de la
« finance de l'ombre ». Il était temps, nous voilà
sauvés ! Mais ce n'est pas tout, nouvelle entorse aux sacro-saintes
règles libérales et cerise sur le gâteau des banques, en cas de
difficultés, ces dernières pourront être recapitalisées par le
Fonds de secours européen prévu par le Mécanisme de stabilité.
Rappelons que certains
économistes et hommes politiques libéraux n'ont pas froid aux yeux
pour qualifier le secours social d'« assistanat ». En
parallèle, la pauvreté augmente et des associations caritatives
comme les « Restos du cœur » (32,1% ou 46 millions
d’euros de ses ressources proviennent de subventions publiques),
risquent de perdre leurs aides européennes, suite à l’arrêt du
Programme européen aux plus démunis, prévu après 2014.
La
récession se poursuit,
et la BCE a baissé ses prévisions de croissance dans la « zone
euro » pour 2013. L'Union Européenne est responsable de la
politique économique d'austérité (hausses d'impôts, réduction
des dépenses des États), qui a pénalisé les entreprises et qui a
ralenti la consommation des ménages. De ce fait, le PIB a diminué,
et les recettes fiscales attendues n'ont pas été au rendez-vous.
Face à la récession, Monsieur Hollande a demandé plus de
croissance et de compétitivité et moins d'austérité. Mais il n'a
pas pu renégocier le traité budgétaire européen mis en place par
Angela Merkel et Nicolas Sarkozy. Encore une promesse de campagne
envolée. La France s'est contentée d'un plan de soutien à la
croissance européenne (Pacte européen pour la croissance et pour
l’emploi), qui consiste à recapitaliser - avec l’argent des
contribuables -, la Banque européenne d’investissement (BEI) à
hauteur de 60 milliards d’euros (+10 milliards) afin que la France
reçoive 5 à 6 milliards de prêt en 2013-2014 pour financer ses
projets d’investissement. Mais que font les patrons et les
entreprises de leurs bénéfices ? Ils paient leurs actionnaires
et jouent en bourse. Le refus de l'Union européenne, Allemagne en
tête, de dévaluer l'euro continue de pénaliser les produits de la
« zone euro » à l'international. Les règles de
l'Organisation mondiale du commerce (OMC) contraignent les 157
États-membres à ne pas prendre de mesures protectionnistes
tarifaires, comme par exemple augmenter leurs droits de douane à
l'importation ou subventionner leurs exportations. Mais le
sauve-qui-peut a contraint les États européens à pratiquer un
protectionnisme non tarifaire, qui consiste à baisser le coût du
travail pour rendre nos produits plus attractifs à l'exportation.
Ce sont encore les travailleurs qui sont victimes des baisses de
salaires et de la précarité imposées par le patronat.
L'Accord
national interprofessionnel
(ANI)
proposé par le Medef (Mouvement des entreprises de France), a été
signé en janvier 2013 par le patronat et les syndicats CFDT, CFTC et
CGC. Ce projet sera soumis au Conseil des ministres du 6 mars
prochain. Selon la CGT,
FO et FSU, l’ANI
« sécurise les employeurs dans la pratique des licenciements
automatiques, ouvre la porte d’une véritable délinquance
patronale et institutionnalise la flexibilité à tout va ». De son
côté l'Argentine a contourné les règles de l'OMC en imposant aux
importateurs de produits étrangers, d'exporter la même valeur de
produits argentins. Un système d'échange qui s'apparente plus au
troc qu'au « laissez-passer » libéral. L'Inde et la
Chine contournent aussi les règles avec des règlements draconiens
sur la sécurité alimentaire, qui limitent leurs importations. La
France a lancé le « made in France » et le gouvernement
ne cesse plus de vanter les initiatives de la société civile, qui,
avec de multiples associations, comme par exemple les AMAPs
(association pour le maintien de l'agriculture paysanne), œuvrent
depuis longtemps pour les circuits courts et la relocalisation de
l'économie, en s'opposant aux abus du libéralisme soutenu par tous
nos gouvernements. Merci à vous que nous traitions d'utopistes hier
!
Sous
les coups de la spéculation,
la flambée des prix des céréales s'est poursuivie en 2012, alors
que la production mondiale a augmenté de 2259 à 2282 millions de
tonnes, de quoi toujours nourrir 13 milliards de personnes, alors que
la faim dans le monde continue. Mais les affamés peuvent se
tranquilliser, le G20 (groupe des 20 pays les plus riches) a trouvé
un accord pour se doter d'un système d'informations sur les marchés
financiers des denrées agricoles afin de lutter contre « la
volatilité des prix agricoles ». Mieux, il a mis en place un
Forum de réaction rapide, mais en raison d'une petite baisse des
cours à l'automne 2012, les risques d'une nouvelle crise alimentaire
se seraient éloignés, merci le G20 ! L’Organisation des Nations
Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a demandé aux
États-Unis de réduire leur production d'éthanol, qui absorbe 40%
de leur production nationale de maïs. On peut toujours rêver !
La
faim dans le monde.
Selon la FAO, en octobre 2012 le monde comptait toujours 870 millions
d’affamés, soit un habitant de la planète sur huit, dont 16
millions dans les pays développés (les nôtres). Le nombre
d'affamés a progressé de 75 millions en 2007 et de 40 millions en
2008, essentiellement à cause de la flambée des prix alimentaires.
Sept pays : Bangladesh, Chine, République démocratique du Congo,
Éthiopie, Inde, Indonésie et Pakistan regroupent les deux tiers de
cette honte. Et 40% d’entre eux vivent en Chine et en Inde. Selon
le Rapport de l'UNICEF de 2011, la dénutrition provoque la mort de
2,6 millions d’enfants de moins de cinq ans chaque année dans les
pays en développement, soit un tiers des décès. Les millions de
Chinois qui souffrent de la faim n'empêchent pas la Chine de
progresser sur l'échiquier international.
La
Chine prépare la relève des États-Unis
avec le yuan, qui est appelé à prendre la relève du dollar,
principale devise de réserve internationale. La Chine va rompre avec
son contrôle administratif des taux de change et l'absence
d'indépendance de la Banque centrale chinoise, qui jusqu'alors était
protégée contre les risques de la spéculation. En mars 2012 la
marge de fluctuation du yuan autour de sa valeur pivot a doublé, en
passant de 0,5 à 1%. L'empire du Milieu, grand sous-traitant de la
planète, avec sa main-d'œuvre de semi-esclaves se met à la page.
L'unique parti communiste chinois dirige toujours la Chine selon la
méthode de Deng Xiaoping datant des années 1970. L'État contrôle
les idées, l'espace public, les personnes et les groupes. Il use de
propagande et de censure et règne sur l'information, la
communication et la politique sociale (antisociale). Le régime au
pouvoir reste totalitaire, il interdit les formations autonomes comme
les associations, les syndicats, les partis rivaux, etc. A tout
moment l'État-Parti peut frapper qui bon lui semble. Communiste dans
la gestion de sa production et capitaliste dans la gestion des
profits, la classe dirigeante a amassé d'immenses fortunes et elle
investit à l'étranger. La « crise » économique
mondiale leur profite. Par exemple, la China Ocean Shipping Compagny
(COSCO) a obtenu le contrôle pour 35 ans de deux des trois
embarcadères du port du Pirée d'Athènes, l'un des ports les plus
importants du commerce international. Les patrons chinois ont imposé
leur modèle social aux travailleurs grecs. Les accords collectifs
sont passés au pilon, les dockers syndiqués ont été licenciés et
remplacés par un personnel sans statut, et les salaires et les
effectifs du personnel ont été réduits.
La
société civile sauve l’honneur : L’ONU
avait
proclamé 2012 « année internationale des coopératives »,
lesquelles incarnent un modèle économique opposé à
l’ultralibéralisme qui détruit les valeurs humanistes. De plus,
il s’avère que les SCOPs, qui privilégient les circuits courts et
l’emploi local, résistent mieux à la « crise » que
les entreprises traditionnelles. La résistance de la société
civile porte ses fruits et doit se poursuivre. Cessons d’acheter
des produits asiatiques, généralisons les SCOPs, étendons le
principe des AMAPs à d'autres secteurs d'activité que
l'agriculture. Dans le Guide
de la révolution non-violente,
je propose une « charte du consommateur responsable ».
Tous les citoyens du monde doivent réagir pour sauver leur peau et
la planète. Organisons-nous, résistons, les travailleurs sont les
seuls producteurs des vraies richesses !
Autres sources : Le Bilan du monde, éd. Le Monde, 2013 ; Le Monde diplomatique de février 2013 ; gouvernement.fr ; fao.org ; Afp.com ; franceinfo.fr ; lepoint.fr ; fr.reuters.com ; rfi.fr ; unicef.org ; observatoiredessubventions.com ; combattrelafaimetlamalnutrition.org.