FEUILLE du PIC (Programme International du Coeur ou du Citoyen)

TRAITE de POLIQUE ALONSO - Coronavirus COVID-19, Drawdown, Démocratie, Écologie, Environnement et Climat, Crise financière, Décroissance, Inégalités Nord-Sud, Consumérisme, Productivisme, Pacifisme, Djihad, Spiritualité, Non-violence, Charte du consommateur responsable, Végétarisme, Commerce équitable, Ville en transition, Gandhi, Non-violence, Résistance civile.

07 janvier 2016

La sûreté du citoyen français

La sûreté est un droit fondamental qui protège les citoyens contre les arrestations, les emprisonnements et les pénalités arbitraires. Historiquement, le droit à la sûreté individuelle s'oppose à la tradition de l’Ancien Régime et des « lettres de cachet », qui permettaient au roi d'emprisonner quelqu’un selon son bon vouloir, sans mandat donné à la force publique par un magistrat. La notion de sûreté des sujets du roi est présente dans la Grande Charte anglaise ou Magna Carta de 1215. En 1679 le parlement anglais rappelle la notion de sûreté personnelle dans l’Habeas corpus. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ne l'oubliera pas : « article II – Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression. » La Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950 énonce une liste de droits et libertés fondamentaux que doivent respecter toutes les autorités des États européens dans son article 5-1- dit « Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul de peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales (...) ». 

Ainsi, le projet gouvernemental de fin 2015, qui consiste à constitutionnaliser l’état d’urgence pourrait s’avérer anticonstitutionnel, c’est-à-dire rejeté par le Conseil constitutionnel. De plus, les lois sont des outils juridiques qui n'écartent pas les mauvaises politiques. Les attentats terroristes de Paris de 2015 relèvent de l'incurie de l'État, pas d’une réforme qui consiste à faire rentrer l’état d'urgence dans la Constitution, ou à déchoir de la nationalité française des condamnées pour terrorisme et crime contre la Nation ; alors que l'article 23 du code civil le prévoit déjà selon le professeur de droit constitutionnel Dominique Rousseau (Le Point.fr du 23/12/2015).

Aujourd'hui, l’état de siège de l’article 36 est prévu en cas de crise grave, lorsque la France est attaquée ou fait l’objet d’une insurrection armée. Il prévoit le transfert des pouvoirs civils de police à l’armée, ainsi que la création de juridictions militaires. Il ne peut concerner qu’une partie du territoire. Aujourd’hui l’état d’urgence est défini par une loi de 1955, il doit être instauré par un décret et il faut une loi pour le prolonger au-delà de douze jours. Cet état restreint fortement les libertés publiques avec la possibilité, sans mandat de la justice de : faire des arrestations arbitraires, d'interdire les manifestations publiques, de perquisitionner de jour comme de nuit, d’instaurer un couvre-feu, d’assigner à résidence, de fermer des salles, des bars, d’interdire des réunions, de contrôler la presse et la radio… ce qui rappelle le « Patriot Act » voté aux États-Unis après le 11 septembre 2001, qui a fait couler beaucoup d'encre dans les associations qui défendent les libertés fondamentales. 

L’article 16 - l’un des plus controversés de la Ve République - octroie au président de la République des « pouvoirs exceptionnels » lorsqu’une menace « grave et immédiate » pèse sur « les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux ». Mis en place par le général de Gaulle, il a été appliqué lors du « putsch des généraux » en 1961 pendant la guerre d’Algérie. Les pleins pouvoirs avaient alors été accordés à de Gaulle de fin avril à fin septembre. (Le Monde.fr, 16.11.2015). 

Ces régimes d'exception d'un autre âge instaurent une forme de dictature temporaire de l'État, qu'il n'est pas raisonnable de prolonger, car une constitution sert à organiser et à limiter le pouvoir du gouvernement et du président. Nous ne sommes plus au Moyen Âge. Ces régimes d'exception sont contraires à la sûreté des citoyens, parce qu'ils abandonnent le principe démocratique, qui veut que la république reste sous le contrôle du peuple ou de ses représentants. La preuve le 15 décembre 2015 le ministère de l'intérieur faisait le bilan suivant : 2700 perquisitions administratives, 488 procédures judiciaires ouvertes, 334 personnes interpellées, 58 condamnations prononcées, etc. Mais la section antiterroriste du parquet de Paris n'avait ouvert que deux enquêtes préliminaires. (delinquance.blog.lemonde.fr, cité par J-J Gandini dans Le Monde diplomatique de janvier 2016)

Les problèmes sociaux, qui font que des jeunes français se transforment en bombes vivantes sur notre territoire, doivent être réglés par des mesures éducatives et sociales (les médias restent muets sur ces points préventifs), et non pas des mesures policières et militaires d'exception, qui renforcent l'adversité et l'insécurité générale. On devrait aussi parler de la sûreté : routière, environnementale, climatique, alimentaire, médicale, etc., pour palier à des milliers de morts mensuels quasi institutionnalisés. La prévention doit prévaloir sur la répression dans tous les domaines. Mais au fait, pourquoi la déchéance de nationalité n'est-elle pas appliquée aux politiques qui pratiquent la corruption, Nicolas Sarkozy en tête de liste.

04 janvier 2016

Réformez la Constitution pour plus de démocratie, pas pour plus d'autorité.


En 2002, le premier ministre Lionel Jospin battu au premier tour de l’élection présidentielle par M. Jean-Marie Le Pen, Président du parti Front national (FN, extrême droite), se retire de la vie publique. François Hollande le remplace à la tête du parti socialiste (PS) sans modifier en profondeur l'orientation du PS. Après le quinquennat de polichinelle de N Sarkozy et en l'absence de leader de l'extrême gauche (la vraie gauche), le socialiste libéral Hollande est élu président de la république en 2012. Comme son prédécesseur socialiste F. Mitterrand (président de 1981 à 1995), Hollande n'a pas modifié la constitution de 1958, qui favorise l'exécutif sur le parlement. 
 
Effectivement, les Français élisent leurs 577 députés au système majoritaire à deux tours. Pour être élu au premier tour, un candidat doit obtenir à la fois plus de 50% des suffrages exprimés et au moins 25% des suffrages des électeurs inscrits. Peuvent se présenter au second tour les candidats ayant obtenu au moins 12,5% des voix dans leur circonscription. Contrairement à l'attente des néolibéraux socialistes et des Républicains (ex-UMP), l'amputation des petits partis a fonctionné dans le sens inverse attendu, de scrutin en scrutin l'extrême droite s'est renforcée en France. Une meilleure représentation populaire avec un passage au scrutin proportionnel pour l'élection des députés, aurait probablement dissout la montée du FM (comme le parti néo-nazi Aube dorée en Grèce), qui résulte d'un profond mécontentement des partis écartés de la représentation parlementaire depuis 1958.

Observons sans entrer dans les détails quelques exemples de scrutins plus démocratiques que le notre pour l'élection des députés, avant d'en tirer des conclusions : En Israël, la Knesset est une assemblée de 120 membres élus au suffrage universel direct selon le mode du scrutin proportionnel de liste avec une seule circonscription. 1% des voix suffit pour obtenir un élu à l'assemblée, et un candidat seul peut se présenter. En Espagne, les 350 députés sont élus au suffrage universel direct au scrutin proportionnel (méthode d’Hondt1) par les cinquante provinces qui sont les circonscriptions électorales. Le quorum est fixé à 3% dans ces circonscriptions, qui ont un nombre de sièges proportionnel à leur population. Les provinces les moins peuplées ont un minimum de deux sièges. Le Sénat espagnol compte 264 membres, 208 d’entre eux sont élus au suffrage universel direct majoritaire, chaque province continentale compte quatre sénateurs. Les 56 sièges restants sont désignés par les parlements des communautés autonomes selon un procédé qui avantage les régions les moins peuplées. Pour les élections régionales les provinces forment les circonscriptions électorales et le quorum varie entre 3% et 5% selon les circonscriptions.
 
Les élections générales espagnoles de décembre 2015 ont vu la disparition du bipartisme politique : le Parti populaire (PP) arrive en tête avec 28,72 % des voix et obtient 123 sièges, mais il perd sa majorité absolue. Le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) est deuxième avec un score historiquement faible de 22,02 % des voix et 90 sièges. Podemos et Ciudadanos obtiennent respectivement 69 et 40 sièges. Au Sénat, le Parti populaire (PP) conserve une majorité absolue en obtenant 124 sièges. Le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) obtient 48 sièges et Podemos obtient 16 sièges.  En Grèce, les 56 circonscriptions élisent au scrutin proportionnel renforcé les 300 députés de l'unique assemblée. Le qualificatif « renforcé » signifie que le parti en tête de l’élection remporte un bonus de 50 sièges. Le quorum est fixé à 3%. Le leader du parti qui obtient la majorité absolue au parlement devient Premier ministre. Résultats des législatives 2015, SYRIZA (extrême gauche) a obtenu 36,3% des voix et 149 sièges, avec une progression de 78 sièges, devant Nouvelle Démocratie (conservateur) avec 27,8% des voix et 76 sièges et une perte de 53 sièges. Vient ensuite Aube dorée (néo-nazi) avec 6,3% des voix2, 17 sièges et la perte d'un siège ; La Rivière (centriste) qui n'avait aucun sièges en obtient 17 ; etc. Preuve que le scrutin proportionnel libère les forces démocratiques. Mais Alexis Tsipras, le leader de SYRIZA nommé premier ministre a vu son projet cadenassé par les institutions européennes, ce qui ne peut qu'exaspérer l'électorat de gauche et renforcer celui d'extrême droite en Europe. En France, les résultats des élections régionales 2015 donnent 48,08% pour l'extrême droite (FN) sans que le FN arrive à présider une seule des 13 régions, ce qui n'est peut-être pas regrettable, mais inéquitable et renforce le mécontentement ; 32,42% vont à la droite et 19,51% à la gauche (chiffres de lexpress.fr), ce qui montre un déplacement des votes de gauche vers l'extrême droite. Les élections européennes (méthode d’Hondt) de 2009 montrent qu'avec un quorum de 5% les petits partis français sont mieux représentés au parlement de Bruxelles qu'à celui de Paris.

Les partis d'extrême droite ont progressé au Royaume-Uni, au Danemark, en Pologne et en Suisse, où la situation économique est meilleure qu'en France, en Espagne et en Grèce. Ces deux derniers pays les plus touchés par le chômage, qui possèdent un scrutin proportionnel, n'ont pas vu percer l'extrême droite autant qu'en France, mais des forces politiques nouvelles anticapitalistes (gauche de gauche), qui incriminent l'Union européenne, sans pouvoir se dégager de son emprise néolibérale capitaliste. Il faut conclure que les partis européens traditionnels, ont tous échoué dans leur politique, qui a consisté à ne pas faire barrage à la grande spéculation financière, laquelle à partir de 2008 a ruiné les économies réelles ; a augmenté le chômage et la précarité ; a ruiné les services publics avec la politique de l'Union européenne (services indispensables en période de crise) ; a augmenté l'inquiétude face aux vagues migratoires dues à l'augmentation de la pauvreté générale (climat inclus), aux guerres et aux attentats terroristes (islamistes aujourd'hui, autres demain), seul refuge d'une jeunesse en mal d'une identité forte. 
 
Les peuples désabusés pratiquent l'abstention ou un vote sanction contre les partis dominants. En France, le problème majeur n'est pas que dans le mode de scrutin et l'absence de projet réformateur (voire une révolution non-violente), il est aussi dans l'échec de l'éducation nationale (les professeurs font ce qu'ils peuvent), qui ne prépare pas les individus à devenir des citoyens, et à la complicité honteuse des médias (les mêmes), qui représentent la principale force d'influence, laquelle est en possession de l’État et des riches (encore les mêmes). Le drame du système français est dans la reproduction des héritiers (pas d'une élite) de plus en plus médiocres, ceux dénoncés par Pierre Bourdieu. F Hollande me fait penser à Louis XIV sous l'Ancien régime, qui faisait des guerres inutiles en ruinant le pays. Mais nous ne sommes plus aux siècles de la grandeur de la France. Nous sommes réduits à être gouverné par des bouffons.

Notes : 1- Selon la méthode d’Hondt, avec l'obtention de 3% ou 5% des votes, les sièges d'une circonscription sont répartis entre les candidats des listes ayant obtenues les plus fortes moyenne.
2 - Un électorat qui fait peur, mais qui s'est stabilisé : 1996, 0,1% des voix ; 2009 ; 0,3% ; mai 2012, 7,0% ; juin 2012 ; 6,9% ; janvier 2015, 6,3% ; septembre 2015, 7,0%